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72 années de règne ...

72 années de mécénat pour la musique française, et hormis Lully, Couperin et Charpentier, qui connaissons nous ?

Louis XIV règne sur la France de 1643 à 1715 ! Il suffit de transposer ces dates de trois siècles pour imaginer la longueur d'un tel règne : 1943 à 2015 ! Le Roi Soleil éclairait le ciel de notre pays pendant 72 longues années. Le jeune Louis XIV qui sortait affaibli de la Fronde des Princes, du giron de sa mère et de son exil forcé à Saint Germain, saisit les rênes du pouvoir avec fermeté. Une vie pour devenir le monarque absolu et transformer son être en symbole de la France. Une vie pour tailler dans la pierre le château des châteaux à Versailles, sous les instructions des plus célèbres architectes et paysagistes de l'Histoire, Mansart, Le Brun et Le Nôtre. Une vie pour promouvoir un art officiel " à la françoise ", des fables de La Fontaine, aux drames de Racine et Corneille, et aux tableaux de mœurs de Molière.

On puisait largement dans le Trésor du royaume pour financer cette production artistique toute à la gloire du maître du Pays. L'architecture néoclassique, la littérature classique, les fables, les comédies nous sont familières. Les uns et les autres puisaient dans l'idéal antique, non dans ce qu'il a d'humaniste comme on le fit à la Renaissance, mais dans ce qu'il a de grandiose, de monumental et de moral : les bâtisseurs de Versailles dans les temples grecs et romains, Racine dans la guerre de Troie, La Fontaine dans les fables d'Esope. Qu'en est-il de la musique ? Pouvait-on revenir à un idéal antique ?

Curieusement, aujourd'hui, on connaît moins les musiciens des 72 années de règne de Louis XIV que les artistes de toute autre forme d'expression, hormis Lully bien sûr, qui devait avoir une poigne singulièrement forte pour avoir réussi à effacer ses concurrents, et accessoirement chasser Molière de son théâtre. Imaginez encore que l'Histoire ne garde de 1943 à 2015 qu'un seul nom de compositeur, alors qu'une armée de musiciens bouillonne de création et que les représentations sont innombrables. Les écrits restèrent, les pierres se patinèrent, les fables de La Fontaine furent récitées par des générations d'écoliers, mais la musique, éphémère, se perdit.

L'oubli dans lequel est tombé la musique française et avec elle, pèle mêle, Charpentier, Robert, Dumont, De Brossard, Campra, Gilles, s'explique bien sûr. Les productions artistiques de la cour de Louis XIV étaient toutes soumises à des règles très rigides. Les jardins de Le Nôtre respectent une géométrie rigoureuse, les vers de Racine, Corneille, La Fontaine ou Molière, obéissent aux canons des alexandrins, des quatrains, des rimes et autres règles de la métrique. Les codes qui étaient alors déclinés dans la musique française étaient aussi précis, rigoureux, respectés, donnant un style global à la musique française. On goûtait la subtilité de l'écriture comme on se délectait d'un mets délicieux préparé sous les ordres de Vatel. C'était une musique de gourmets. Mais les partitions furent balayées, renversées par la liberté virtuose italienne, jetées au panier comme autant de carcans étriqués dans lesquels la musique ne pouvait plus plaire.

Quelle injustice ! Tout comme les vers de Racine ou Molière, qui sont étranges à nos oreilles et qui nous émeuvent pourtant, la musique française de cette époque nous touche droit au cœur. Et quelle récompense lorsqu'on se penche sur ces partitions oubliées d'Henri Du Mont et de Sébastien de Brossard…

La prononciation du latin "à la française" ou latin gallican.

Henri Dumont : Benedicam Dominus, Nisi Dominus, Beati Omnes.

Sébastien de Brossard : Miserere Mei, In convertendo.

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